DISSERTAZIONI DI DOTTORATO
2014-2015
VIEYRA Edmond Léonce
Dynamique scripturaire de 1 Corinthiens 1–4.
Une rhétorique de l’agir de Dieu pour la redéfinition des rapports ecclésiologiques à Corinthe
Mod.: R.D. Pasquale Basta En dépit de l’intérêt que suscite 1Co 1–4 chez les exégètes, la présence de l’Écriture dans l’argumentation ne reçoit qu’une maigre considération. Pourtant, des citations scripturaires qui figurent dans la lettre, la péricope en compte un nombre important dont la répartition dans la composition du texte est significative. L’objectif de notre recherche est de mettre en lumière l’originalité de l’art rhétorique de Paul qui, loin de s’assimiler aux orateurs classiques, conserve la vive conscience d’être apôtre du Christ au service de Dieu pour la croissance de l’Église à Corinthe. Il s’agit d’appréhender sa stratégie argumentative en vue d’une exégèse conséquente du texte.
Mis à part la praescriptio (1,1-3) et l’action de grâce (1,4-9), le discours rhétorique couvre 1Co 1,10–4,21 composé d’une unité rhétorique (1,10–3,23) et d’une post-peroratio (4,1-21). En 1Co 1,18–3,23, significative est la présence des citations ayant fonction de preuves d’autorité. Ces preuves marquent les sub-probationes (1,19−2,5; 2,6b−3,4) et la peroratio (3,18-23) de sorte que la coïncidence de leur extension (1,19–3,20) avecl’argumentatio (1,18−3,23) laisse entrevoir une relation entre l’Écriture et la rhétorique de Paul.Le fait que le fil des citations définit une boucle sur la base de l’agir sapientiel de Dieu en 1Co 1,19-20a et 3,19b-20 est indicateur d’une dynamique scripturaire confirmée par l’articulation des citations avec allusions et échos non moins importants.
La dynamique se révèle inversive et diacritique respectivement en 1Co 1,19–2,5 et 2,6b–3,4. Dans la première sub-probatio, l’inversion apparaît à travers la subversion de l’agir de Dieu contre la sagesse du monde (1,19-20) et les valeurs dont se vantent l’homme (1,27-29). Cette subversion se déploie au moyen des choix paradoxaux de Dieu (1,21.25.27-28) auxquels se conforme la prédication apostolique (1,22-24), notamment le contenu et le mode kérygmatiques de Paul (2,1-5). 1Co 1,20–2,5 se définit alors comme la concrétisation de l’oracle de Dieu en 1,19.
Dans la seconde sub-probatio, émerge la diacrisis de la sagesse de Dieu qui apparaît en mystère pour opérer une distinction entre les apôtres – à qui elle fut révélée par la médiation de l’Esprit (2,10) au profit des croyants – et les princes de ce monde qui ne l’ont pas connue. La diacrisis a pour fonction d’éclairer les Corinthiens sur leur état de σαρκικοί en raison de leur immaturité attestée par leur conduite purement humaine dans la situation actuelle de la communauté.
D’un point de vuerhétorique, étant donné que l’inversion et la diacrisis émanent de l’agir de Dieu, toutes deux se révèlent l’outil irréfutable au service de l’argumentation en 1Co 3,5–4,21. Elles sont utiles à soutenir l’ethos et le logos de l’apôtre pour une incidence efficiente sur le pathos des Corinthiens afin de les persuader de l’incohérence de leur vision ecclésiologique par rapport à l’agir paradoxal de Dieu et de les engager à la conversion de cette vision.
D’un point de vue exégétique, à la lumière de la dynamique scripturaire, Paul décrypte les motivations de la situation à Corinthe. Ayant donc ciblé les causes du problème dans l’impact de la sagesse séculière sur la conception ecclésiologique des Corinthiens, il s’approprie l’agir subversif de Dieu opérant dans l’Écriture, la croix, la vocation des Corinthiens et la vie missionnaire des apôtres pour en faire le critère exemplaire et valide pour la redéfinition du statut ecclésial des apôtres et de la communauté. Somme toute, sa rhétorique est redevable à l’autorité de l’agir de Dieu qu’il assume pour définir la cohérence de l’argumentation et en assurer la pertinence.